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L_antisémitisme de Schmitt

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L'antisémitisme de Schmitt
Author(s): Hugues Rabault
Source: Cités, No. 17, Résistances de la société civile: À l'époque de la mondialisation (2004), pp.
165-171
Published by: Presses Universitaires de France
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40621007 .
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L 'antisémitisme de Schmitt 
Hugues Rabault 
II est des auteurs qu'il devient difficile de lire au fur et à mesure qu'on les 
connaît mieux. Après la disparition de Schmitt, en 1985, un débat s'est 
engagé en Allemagne autour de sa relation avec le IIIe Reich. Certains 
travaux, tels ceux de J. W. Bendersky ou de H. Quaritsch1, ont été cri- 
tiqués pour leur interprétation indulgente du parcours de Schmitt : 
l'engagement nazi sous le IIP Reich y apparaissait comme une péripétie, 
une parenthèse... Le débat s'est rapidement porté sur l'antisémitisme de 
Schmitt. Un des auteurs les plus virulents est Bernd Rüthers, qui publia à 
la fin des années 1 980 Un droit dégénéré1 et Carl Schmitt sous le IIIe Reich*. 
Le parcours de Schmitt et son attitude y étaient détaillés avec une minutie 
et un luxe de révoltants détails, tels que toute interprétation devenait 
suspecte. Le personnage y était décrit, non seulement comme un monstre 
sur le plan théorique, mais aussi comme un véritable complice, se réjouis- 
sant publiquement du sort de ses collègues persécutés. Il faudrait encore 
citer nombre de travaux4. La parution, en 1991, du Glossarium5, journal 
1. Joseph W. Bendersky, Carl Schmitt, Theorist for the Reich, Princeton, 1983; Helmut 
Quaritsch (dir.), Complexio Oppositorum. Über Carl Schmitt, Berlin, 1988. 
2. Bernd Rüthers, Entartetes Recht. Rechtslehren und Kronjuristen im Dritten Reich, München, 
C. H. Beck, 2* éd., 1989. 
3. Bernd Rüthers, Carl Schmitt im Dritten Reich. Wissenschaft ah Zeitgeist-Verstärkung?, 
München, C. H. Beck, 2e éd., 1990. 
4. Pour un bilan sur les recherches concernant Schmitt, voir Reinhard Mehring, Carl Schmitt 
zur Einführung, Junius, Hambourg, 2001. 
5. Carl Schmitt, Glossarium. Aufzeichnungen der Jahre 1947-1951, Berlin, Duncker & Hum- 
blot, 1991. 
Cités 17, Paris, PUF, 2004 
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L'antisémitisme 
de Schmitt 
Ε Rabault 
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Analyses et documents 
Contre le blanchiment 
du nazi Carl Schmitt 
tenu par Schmitt de 1947 à 1951, et dont il avait envisagé la parution 
posthume1, montre que le Schmitt d'après la Seconde Guerre mondiale 
est resté profondément antisémite. Un chercheur, Raphael Gross, dans 
Carl Schmitt et lesjuiß, a consacré à l'antisémitisme de Schmitt une étude 
exhaustive, publiée en 2000, dont le caractère novateur a été salué2. 
L'antisémitisme y est présenté comme véritable substrat du système théo- 
rique de Schmitt, en particulier de la fameuse distinction ami/ennemi. 
L'antisémitisme de Schmitt s'enracine dans un anti-judaïsme chrétien 
traditionnel dont on trouve les traces des les écrits de jeunesse du juriste". Sous 
cet angle, une formule de 1936 suffit à résumer la pensée de Schmitt, tout 
entière orientée contre ce qu'il appelle la « polarité du chaos juif et de la 
légalité juive, du nihilisme anarchiste et du normativisme positiviste, 
du matérialisme sensualiste grossier et du moralisme abstrait »4. Cette 
formule peut être rapportée à l'idée de « polarité éthique-économie », 
issue de La notion de politique**. Afin de rendre compte de cette doulou- 
reuse question, pour un public français qui n'a guère bénéficié de l'écho 
des débats qui ont eu lieu en Allemagne, il convient, malheureusement, 
de citer des propos choquants. Ceux-ci permettent cependant de com- 
prendre que Y antisémitisme de Schmitt s'analyse comme un élément clé de 
Y anti-individualisme, qui constitue l'un des ressorts de la réception de son 
œuvre. 
I - L'ENGAGEMENT ANTISÉMITE SOUS LE IIIe REICH 
Schmitt, membre du parti nazi à partir de 1933, soutint bruyamment 
la politique d'Adolf Hitler. Commentant les « lois de Nuremberg », qui 
régissaient notamment la « protection du sang et de la dignité alle- 
mande », et qui constituèrent le fondement légal de la persécution des 
Juifs, Schmitt publia un article enthousiaste, pompeusement intitulé : 
1. Voir la préface de Eberhard Freiherr von Medem, ibid., p. VI. 
2. Raphael Gross, Carl Schmitt und die Juden. Eine deutsche Rechtslehre, Frankfurt am Main, 
Suhrkamp, 2000. 
3. Ibid., p. 31 ets. 
4. Reinhard Mehring, op. cit., p. 68. La formule est issue de son intervention « La science alle- 
mande du droit dans sa lutte contre l'esprit juif», au colloque de 1936, in Cités 14 (avril 2003), 
p. 173-180. 
5. Carl Schmitt, La notion de politique, Paris, Calmann-Lévy, 1972, p. 116 et s. 
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« La constitution de la liberté »' Peu après, les 3 et 4 octobre 1936, un 
colloque « scientifique » se tint à la « Maison du front juridique alle- 
mand ». Son titre était « La Juiverie et la science du droit »2. Schmitt se 
trouva au centre de son organisation. Il est même possible de poser 
l'hypothèse qu'il en fut un initiateur3. Les chercheurs allemands ont révélé 
le contenu de ce colloque. Il suffit de se référer à leurs travaux. Il faut citer 
quelques propos du juriste, qui portait alors le titre de « Chef de groupes 
du Reich » : « On ne s'en tire pas avec juste un antisémitisme à la mesure 
du sentiment et le rejet général de quelques aspects juifs particulièrement 
envahissants et désagréables : cela nécessite une certitude fondée à la 
mesure de la connaissance. » II concluait son intervention en citant une 
phrase d'Adolf Hitler : « De la façon dont je me protège du Juif, je lutte 
pour l'Œuvre du Seigneur. »4 L'élaboration d'une liste des juristes 
d'origine juive fut déclarée par Schmitt comme « une tâche nécessaire » : 
« Nous ne pouvons poursuivre notre travail dans une direction de tech- 
nique de bibliothèque et préserver nos étudiants de la confusion par le 
nettoyage des bibliothèques que sur la base d'une liste exacte. » Les 
conclusions du colloque contenaient ainsi la promesse solennelle : « De 
collaborer à la réalisation d'une bibliographie sans faille et digne de 
confiance de tous les écrivains juifs dans le domaine du droit et de la 
science économique. » Schmitt participa directement à la réalisation de 
cette liste de 188 pages qui parut peu après sous le titre de « Liste des 
écrits juridiques et économiques d'auteurs juifs »5. Lorsqu'on examine les 
ouvrages antérieurs à 1933, on réalise combien cette thématique devait 
déjà se trouver à l'arrière-plan de la réflexion de Schmitt. Les juristes alle- 
mands d'origine juive y figuraient déjà comme ennemis de la conception 
schmittienne de l'État. Dans un interrogatoire, après la guerre, il affirma 
que ses prises de positions anti-juivesrelevaient d'une « thèse scien- 
tifique » qu'il « ose [rai t] soutenir devant tout collège scientifique de 
ce monde »6. Toutefois, l'hypothèse d'un engagement opportuniste 
1. Bernd Rüthers, Entartetes Recht, op. cit., p. 134. 
2. Voir Christian Busse, « Eine Maske ist gefallen ». Die Berliner Tagung « Das Judentum und 
die Rechtswissenschaft» vom 3.14. Oktober 1936, dans Kritische Justiz, Heft 4, 2000, p. 580-593 ; 
trad, franc, dans Cités 14 (avril 2003), p. 173-180. 
3. Ibid, p. 587. 
4. Ibid., p. 584. Formule également citée par Bernd Rüthers, op. cit., p. 136. Voir encore 
Reinhard Mehring, op. cit., p. 67 et s. 
5. Ibid., p. 588. Voir encore Bernd Rüthers, op. cit., p. 138, et Reinhard Mehring, op. cit., p. 69. 
6. Bernd Rüthers, op. cit., p. 179. 
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L'antisémitisme 
de Schmitt 
H. Rabâult 
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Analyses ct documents 
Contre It blanchiment 
du nazi Carl Schmitt 
demeura largement représentée, jusqu'à la publication du Glossarium. 
Ce texte exprime un antisémitisme radical·. Ses 320 pages comportent 
plus de quarante développements explicites relatifs aux « Juifs », « Israé- 
lites », etc.2. 
II - L'ANTISÉMITISME RADICAL DU GLOSSARIUM 
II convient de souligner que l'attitude de Schmitt relève non de divaga- 
tions abstraites, mais porte également sur des hommes réels, que Schmitt 
a fréquentés dans les universités allemandes, et qui, parfois même, l'ont 
soutenu3. L'anti-humanisme de sa théorie de la distinction ami/ennemi, 
posant le droit de l'État, à l'intérieur et à l'extérieur, comme droit à 
l'anéantissement physique*, trouvait alors son expression concrète. Le Glos- 
sarium met en évidence la profonde adhésion de Schmitt à la doctrine 
antisémite, mais aussi sa fidélité à la période national-socialiste. Schmitt y 
reprend sa critique de la criminalisation de la guerre d'agression. 
L'Allemagne est la proie de la « vengeance » des Juifs5. Schmitt se présente 
lui-même comme victime de la « terreur des Juifs »6 : non d'un génocide, 
mais « du plus éhonté Ideocidium »7. La rédaction du Glossarium est 
contemporaine de celle du Nomos de la terre. Il en constitue, en quelque 
sorte, la face cachée. À cet égard, ce texte accrédite la thèse d'un anti- 
judaïsme, souvent crypté, dans l'ensemble de l'œuvre de Schmitt. La 
comparaison des deux textes permet de reconstituer les arrière-pensées 
sous-jacentes à l'œuvre d'avant 1933, même s'il apparaît qu'ici l'anti- 
judaïsme d'inspiration catholique prend un tour proprement para- 
noïaque. Schmitt voit les « Juifs comme une élite à côté des chrétiens ; 
comme de plus ou moins loyaux gardiens de la place, lorsque les élites 
chrétiennes sombrent dans le légalitaire. Car en ce qui concerne la 
logique, la tactique et la pratique d'une légalité devenue vide, les Juifs s'y 
entendent en tout cas mieux que tout peuple chrétien, qui ne peut cesser, 
1. Raphael Gross, op. cit., p. 378. 
2. Ibid., p. 374. 
3. Bernd Rüthers, op. cit., p. 131. 
4. Carl Schmitt, La notion de politique, op. cit., p. 86 et s. 
5. Glossarium, p. 45. 
6. Ibid.. d. 81. 
7. Ibid., p. 265. 
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contre la loi, de croire à l'amour et au charisme »1. Au sujet d'un ouvrage 
américain qui pose que le totalitarisme a besoin de créer de nouveaux 
démons, et que les Juifs constituent une meilleure personnification de 
l'ennemi démoniaque que le communisme, Schmitt ajoute ce commen- 
taire : « Car les Juifs restent toujours des Juifs. Tandis que le Communiste 
peut s'améliorer et changer. Cela n'a rien à voir avec la race nordique, etc. 
Le Juif assimilé est précisément le vrai ennemi. Cela n'a aucun sens de 
démontrer comme fausse la Parole des Sages de Sion. »2 Commentant 
Karl Marx, il affirme : « L'émancipation des Juifs s'est accomplie en sorte 
que les Chrétiens sont devenus Juifs (...). » II s'agit non d'une émancipa- 
tion mais d'une assimilation : « Finalement tout le village doit parler 
yiddish (mauscheln). »3 En somme, l'émancipation des Juifs apparaît 
comme déchristianisation et, à terme, comme judaïsation. Ces idées appa- 
raissent sous un angle plus métaphysique lorsque Schmitt voit dans les 
doctrines de Karl Marx ou de Sigmund Freud une « méthode » et une 
« technique de l'observation des faits » liées à la fin de la Weltanschauung. 
Selon Schmitt, le judaïsme contribue donc de façon essentielle à un 
phénomène qu'il dénonce : le déclin du caractère mystique de h politique, 
au pathétique issu de l'État baroque, en un mot de la théologie politique. À 
la place s'instaure un rationalisme universaliste désenchanté. L'origine de 
cette évolution se trouve dans la figure - récurrente dans l'œuvre de 
Schmitt - de Spinoza et son Deus sive Naturel· : « Comme nous étions 
désunis, les Juifs se sont sub-introduits. Tant que cela n'est pas compris, il 
n'y a pas de Salut. Spinoza fut le premier (...). »6 
III - ANTISÉMITISME ET ANTI-INDIVIDUALISME 
Ainsi Schmitt peut-il se percevoir comme un vaincu7 : il se mue en 
théoricien du chaos. Selon lui, la fin de la Seconde Guerre mondiale 
s'ouvre donc sur le chaos cosmopolitique, sous la forme d'un triomphe 
anarchique où dominent le libéralisme commerçant anglo-saxon, la 
1. Ibid., p. 154. 
2. Ibid., p. 18. 
3. Ibid,p.6'. 
4. Ibid. 
5. Ibid., p. 28. 
6. Ibid., p. 290. 
7. Ibid., p. 29. 
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L antisémitisme 
de Schmitt 
H. Mault 
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Analyses et documents 
Contre le blanchiment 
du nazi Carl Schmitt 
subversion communiste internationale, et derrière lesquels se dissimule 
Γ « esprit juif». Le Juif, dans l'œuvre de Schmitt, incarne la totalité de 
l'hostilité à l'État. La mythologie schmittienne traduit une situation où le 
destin de l'humanité est lié à la notion à' État. Schmitt envisage alors 
la menace portant sur l'Etat comme visant directement l'humanité. 
L'antisémitisme schmittien est ainsi une pierre dans un édifice plus large 
constitué par sa théorie de lÉtat. Ce qu'il convient de souligner, c'est que 
la théorie de l'État de Schmitt recèle en elle-même une forme de patho- 
logie contemporaine, dont l'antisémitisme schmittien est un aspect. 
L'origine de cette pathologie a été décrite par le philosophe Ernst Cassirer 
dans Le Mythe de lÉtaf. Chez Schmitt, elle apparaît à travers l'idée de 
l'État comme ordre de la volonté et finalement de la décision. Très large- 
ment, derrière le problème concret de l'antisémitisme, se dissimule une 
question plus essentielle, qui est celle de la revendication du primat de la 
totalité abstraite de VÉtat, de la prééminence de l'autorité, de la hiérarchie, 
sur l'individu. L'antisémitisme de Schmitt vient remplir la place ouverte 
par sa mystique de l'Etat, qui nécessite l'existence d'un ennemi intrinsèque 
de VÉtat, un individu α-étatique réel. Schmitt évoque souvent la figure 
de X anarchiste, représentée par Max Stirner. Mais, en tant que tel, l'anar- 
chiste reste une identité abstraite. En revanche, le Juif peut devenir un 
anarchiste concret, c'est-à-dire un individu dont le destin n'est pas lié à 
celui d'un État. Si l'anarchiste n'est l'ennemi de l'État que par son 
discours, par sa prise de position, le Juif apparaît comme un anarchiste, une 
figure cosmopolite, quelle que soit sa position. C'est pourquoi l'anti- 
sémitisme est une exigence existentielle de la théorie de Schmitt : c'est tout 
le sens de l'idée selon laquelle le Juif ne peut « s'améliorer». La figure 
du Juif incarne, dans le cadre de la fameuse distinction ami/ennemi, 
l'opposition État/individu sous la forme concrete, à travers l'idée d'un 
homme non rattachéà un État. 
Tout cela amène à insister sur la nécessité qu'il y a de lire de près 
Schmitt. Celui-ci est avant tout théoricien d'un État autoritaire. 
Cependant, l'État autoritaire de Schmitt n'est pas nécessairement anti- 
démocratique. En effet, la démocratie ne représente que l'aspect formel de 
l'État, dans la mesure où elle constitue essentiellement une délégation de la 
question de la décision. La question primordiale est celle de la limitation de 
VÉtat. Schmitt conteste tout ce qui vise à atteindre ce but : le parlementa- 
1. Ernst Cassirer, Le Mythe de VÉtat (1946), Paris, Gallimard, 1993. 
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risme, le fédéralisme, le contrôle juridictionnel de l'État, etc. Tout cela 
lui apparaît comme lié à Y individualisme, destructeur des structures 
anciennes. Sous cet angle, V antisémitisme apparaît comme forme de Y anti- 
individualisme contemporain. Par ailleurs, la réception de l'œuvre de 
Schmitt met en évidence qu'elle doit aussi être perçue comme l'expression 
d'une pensée commune, d'un inconscient collectif. Cela est tout particuliè- 
rement vrai de la nostalgie du politique qu'elle exprime. À travers les 
œuvres d'Adam Smith ou de Karl Marx surgissait l'idée que l'humanité 
est régie par des lois sociales, par une socialite spontanée et non par des 
constructions conscientes et volontaires relevant du « politique ». Il y avait 
là une révolution épistémologique sans précédent. On peut parler d'une 
nouvelle conscience de soi de la société. Que cela suscite des phénomènes 
de ressentiment, il est possible de le constater dans les lieux communs du 
conservatisme : le triomphe de l'économique, le déclin du politique, la fin des 
valeurs, etc. Ces thématiques traduisent le sentiment d'impuissance de 
groupes ou de castes qui se perçoivent comme des élites ignorées. V anti- 
sémitisme est aussi une expression particulière de ce ressentiment, qui 
exige d'attribuer les maux de l'époque à une élite occulte. 
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L'antisémitisme 
de Schmitt 
Κ hbault 
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	Article Contents
	p. 165
	p. 166
	p. 167
	p. 168
	p. 169
	p. 170
	p. 171
	Issue Table of Contents
	Cités, No. 17, Résistances de la société civile: À l'époque de la mondialisation (2004), pp. 1-213
	Front Matter
	Éditorial: <italic>Au nom de la société civile</italic> [pp. 3-6]
	DOSSIER: <italic>Résistances de la société civile à l'époque de la mondialisation</italic>
	<italic>Présentation</italic> [pp. 9-11]
	<italic>De la société civile à la société civile mondiale</italic> [pp. 13-23]
	<italic>L'affirmation politique de la société civile</italic> [pp. 25-37]
	<italic>Désaccord, dissentiment, désobéissance, démocratie</italic> [pp. 39-53]
	<italic>La faille et l'exploit : l'activisme informatique</italic> [pp. 55-72]
	<italic>L'insurrection et le « despotisme représentatif »</italic> [pp. 73-86]
	<italic>L'engagement en résistance</italic> [pp. 87-99]
	<italic>Point de vue critique Porto Alegre : le mythe et la réalité</italic> [pp. 101-110]
	ENTRETIENS
	<italic>La résistance de la société contre les islamistes en Algérie</italic> [pp. 113-120]
	<italic>Attac, force de résistance ?</italic> [pp. 121-124]
	<italic>Le nouveau dilemme démocratique : régulation réformiste ou contestation pure ?</italic> [pp. 125-129]
	GRAND ARTICLE: <italic>Bourdieu, savant et politique</italic> [pp. 133-141]
	ANALYSES ET DOCUMENTS: <italic>Contre le blanchiment du nazi Carl Schmitt</italic>
	<italic>Présentation générale Carl Schmitt, après le nazisme</italic> [pp. 145-148]
	<italic>Présentation du juriste Erich Kaufmann (1880-1972)</italic> [pp. 149-152]
	<italic>Carl Schmitt et son école. Lettre ouverte à Ernst Forsthoff</italic> [pp. 153-156]
	<italic>Carl Schmitt vu par les chercheurs allemands</italic> [pp. 157-164]
	<italic>L'antisémitisme de Schmitt</italic> [pp. 165-171]
	<italic>Une étrange édition : Schmitt expurgé</italic> [pp. 173-179]
	<italic>Glossarium</italic> (Extraits): Présentation [pp. 181-210]
	Droit de Cites 1: la capitation islamiste du droit, Strategies islamistes
	Back Matter

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